Cet été, le service de favoris partagés « delicious » a changé de peau. Il est passé d’un design minimaliste résolument « Web 0.1 » à quelque chose de minimaliste aussi, mais plutôt dans la veine « 2.0 » avec des icônes en forme de muffins et des trucs comme ça. Ce changement fait assez peu de différence à mes yeux vu que je n’utilise ce service qu’à travers le « bookmarklet » de mon navigateur préféré, et le fil RSS que je visionne dans mon agrégateur préféré, donc je ne le vois pour ainsi dire jamais. Mais par contre, j’ai bien remarqué qu’ils avaient changé l’adresse de leur site : de http://del.icio.us ils sont passés à http://delicious.com.
Ce changement me paraît totalement emblématique à la fois de la démocratisation (recherchée ou effective, cela reste à savoir) du service, et d’un état de fait du Web d’aujourd’hui qui est la transparence – ou plutôt, l’invisibilité – des URI. Je m’explique : le nom du service d’origine était une astuce géniale qui utilisait et détournait le principe des noms de domaines « en-point-quelque-chose » : l’extension « .us » était avalée par le reste du nom de domaine, ne se prononçait plus, s’effaçait devant l’identité du service. « delicious.com » c’est carrément triste à côté (et même, si on veut, « www.delicious.com » !!!)
Quand on voit la confusion qui existe aujourd’hui dans l’esprit des gens (là je pense à l’internaute qui sait utiliser un webmail, poster sur un blog, mettre ses photos dans flickr mais n’a aucune idée de comment tout cela fonctionne) autour de la notion d’adresse URL, cette évolution semble toutefois logique. Cette astuce, qui, à part les « web-geeks », pouvait la comprendre ? Ca devait surtout compliquer le bouche-à-oreilles (non, pas en un seul mot, tu tape D-E-L, puis point, puis…)
Le navigateur de Google, Chrome, s’assoit sans vergogne sur la distinction entre une recherche et une adresse : de toute façons, franchement qui s’embarasse de retenir une adresse quand le moyen le plus rapide de la retrouver est de rechercher le site dans Google ? Donc autant n’avoir qu’une seule « barre » qui va, suivant ce qu’on lui demande, envoyer directement l’adresse demandée ou répondre par une liste de résultats Google. Personnellement cette confusion m’agace mais ça doit être mon côté bibliothécaire à chignon qui aime que chaque chose soit bien identifiée, rangée, classée (ou alors c’est l’influence des cases du voisin).
Admettons alors que le changement d’URI du service Delicious soit dans l’air du temps. Mais au fait, qui se soucie encore d’enregistrer des favoris, alors qu’on peut les twitter, les facebooker, les smober, ou faire n’importe quoi d’autre d’un coup de commande ubiquity (à tester d’urgence si vous ne l’avez pas déjà fait – vous n’êtes pas près d’abandonner Firefox…) ? Heureusement, il reste http://identi.ca/ !

