Architecture de l’information : qu’est-ce que c’est ?

L’architecture de l’information est un domaine méconnu en France, et en particulier dans les bibliothèques. Pourtant, elle a des affinités certaines avec la bibliothéconomie, et la profession gagnerait à l’intégrer à ses réflexions en termes d’évolution du métier. C’est pourquoi j’ai décidé de m’attaquer une bonne fois à la définition de cette discipline étrange et de ce qu’elle peut nous apporter, à nous les techie librarians.

Définition

L’architecture de l’information a une double origine : un constat et une métaphore.

Un constat : avec le grossissement des sites Web, l’augmentation de la quantité d’information qu’ils contiennent, et la complexification des techniques, il est devenu clair que concevoir un site Web efficace échappe à la compétence des seuls techniciens ou graphistes. Un chaînon manquant apparaît, à l’intersection de la production de contenu (compétences éditoriales) et de la mise en oeuvre technique et graphique (compétences informatiques et design). Ce chaînon manquant, c’est l’architecte de l’information.

Une métaphore : celle du bâtiment bien sûr. S’il est possible de construire une maison sans faire appel à un architecte, dès qu’on s’attaque à un bâtiment important, une vue d’ensemble s’avère nécessaire ou pour le moins utile. L’architecte est aussi celui qui est à la fois capable de comprendre les besoins du commanditaire et les fonctions du bâtiment, et de savoir quelles techniques et quels matériaux pourront être utilisés pour la mise en oeuvre.

L’architecte de l’information est donc celui qui détient la vision globale du site Web. Cette vision globale doit avoir à la fois la qualité d’une vision extérieure, objective pour conserver sa globalité, et en même temps être proche des rouages internes de la production du site afin de bien comprendre les enjeux et de mettre en oeuvre une analyse réaliste.

Méthode

La base du travail de l’architecte de l’information est de comprendre les objectifs du site et le public visé, celui-ci pouvant être réparti en types d’utilisateurs qui pratiquent différents types d’usages. Le reste de l’analyse peut aisément être compris en filant la métaphore du bâtiment, car la conception des sites est fortement spatialisée.

  • la typologie et la classification des contenus revient à définir quels seront les espaces du bâtiment et quelles seront leurs fonctions
  • il faut ensuite réfléchir à la manière dont on circule entre ces espaces, et aux repères qu’on donne aux utilisateurs pour s’orienter : c’est la navigation dans le site Web et les outils de recherche d’information.

Enfin, l’architecte de l’information modélise tout ceci dans des maquettes fonctionnelles ou wireframes en anglais, dont l’objectif est de donner une vue d’ensemble graphique de la page et de la façon dont elle s’articule avec le reste du site. Cette maquette est une sorte de gabarit neutre sur lequel s’appliquera ensuite le graphisme.

Disciplines connexes

L’architecture de l’information est liée directement à d’autres disciplines aux noms barbares, telles que le design interactif, l’usabilité, la trouvabilité ou encore l’expérience utilisateur.

Cette dernière est intéressante parce que difficile à percevoir et surtout à quantifier. L’expérience utilisateur, c’est l’impression de se sentir bien quand on visite un site, ce qui est en partie une affaire de graphisme mais pas seulement. L’architecte de l’information réfléchit à enrichir l’expérience utilisateur, c’est-à-dire à essayer de tirer parti de ce que le média Web apporte de plus par rapport aux autres.

Quel rapport avec nous ?

Pour ceux qui se demandent encore le rapport avec les bibliothèques, je récapitule… L’architecture de l’information fait fortement appel à des compétences qui sont celles des bibliothécaires : classifier l’information, gérér des masses de ressources parfois hétérogènes, favoriser l’accès à l’information en fournissant des outils de recherche ou en aidant les lecteurs à s’orienter dans les collections. En retour, ce que l’architecture de l’information a à nous apporter, c’est son expérience des nouvelles technologies, sa conception spatiale de l’information, et surtout son côté très user-oriented, centré sur les besoins et les pratiques des usagers.

La réflexion déjà bien avancée chez les anglo-saxons a cet avantage de refléter un positionnement abouti de l’architecture de l’information au milieu d’un bouquet d’autres disciplines par rapport auxquelles on a parfois du mal à se situer. Dans la réfléxion sur le métier de bibliothécaire à l’heure du numérique, il est capital de savoir exactement où se situent nos compétences, et comment elles s’imbriquent avec celles des autres acteurs.

Ressources

Au risque de me répéter, je récapitule l’ensemble des ressources sur le sujet :

Livre

  • la bible de l’architecture de l’Information c’est l’ouvrage de Louis Rosenfeld et Peter Morville, Information architecture for the World Wide Web, le livre à l’ours polaire chez O’reilly, 2e édition en 2002 (en anglais)

Sites Web

Blogs

  • Bloug le blog de Louis Rosenfeld (en anglais)
  • FredCavazza.net blog très riche avec plein de définitions et de ressources super utiles (en français)